samedi 19 mars 2011

Le paradoxe de l'allemand, un paradoxe bien français

Lorsqu'en haut-lieu, on n'ignore rien du « paradoxe de l'allemand » !


Dans un rapport d'information daté de l'année 2003, Monsieur Jacques Legendre, sénateur Ump du Nord, analysait déjà le paradoxe de l'allemand et pointait la nécessité de soutenir l'allemand à l'école.
Il y constatait que l'allemand était « en passe de devenir une langue rare et sinistrée » en constatant la baisse en pourcentage du nombre d'apprenants : en LV1, de 14 % dans les années 70 à 8 % dans les années 2000 ; en LV2, de 36 % dans les années 70 à 13 % en 2001.
Il se déclarait préoccupé par cette situation pour diverses raisons :
  • la place importante de la langue allemande en Europe ( 1ère langue maternelle et poids renforcé avec l'élargissement de l'union européenne vers les pays de l'Est) et l'importance d'un couple franco-allemand solide car moteur de l'Europe
  • la qualité de la coopération franco-allemande dans le milieu éducatif ( succès des dispositifs pédagogiques tels l'Abibac, les programmes d'échanges individuels, les échanges scolaires, l'OFAJ) et hors du cadre scolaire par le biais des jumelages.
  • les attentes et les besoins du monde économique : l'Allemagne est notre premier partenaire commercial ( 50% de nos échanges commerciaux, 350 000 personnes travaillent grâce aux échanges France-Allemagne, la France est la destination touristique de nombreux allemands, la langue allemande est la deuxième langue la plus recherchée sur le marché du travail français et les besoins ne sont pas satisfaits)
Face à ce constat, il soulignait que le manque de germanistes était négligé par le système scolaire. Jacques Chirac, alors président de la République, s'accordait sur ce point déclarant que « la connaissance de la langue du partenaire [était] la condition fondamentale d'une coopération efficace entre les deux pays. Lui aussi semblait gêné par le paradoxe de l'allemand et relevait que « le seul point un peu préoccupant [dans] la coopération de plus en plus intime [entre les deux partenaires] touchait la compréhension mutuelle des langues respectives. »
C'est alors qu'avec Gerhard Schröder, il avait lancé plusieurs initiatives dont la semaine franco-allemande pour promouvoir l'allemand « durablement »
Depuis, quelques années se sont écoulées et le paradoxe de l'allemand est toujours là, de plus en plus prégnant, l'Europe élargie à l'Est ne parle pas davantage la langue de Goethe, la coopération franco-allemande est toujours affichée comme une priorité. De nombreuses initiatives voient le jour ( certifications, nouveaux échanges individuels, rencontres franco-allemandes …) et a son agenda pour 2020. Pourtant, à l'école, malgré l'investissement des enseignants qui arrivent, petit à petit, à mobiliser à nouveau des élèves, les classes de germanistes ferment parce qu'elles restent, malgré tout, moins rentables que les autres. Dans le monde du travail, on continue à déplorer le manque de germanistes, à embaucher à prix d'or les rares candidats et à devoir former les employés alors que nombre d'enseignants d'allemand se voient contraints de se reconvertir sans aide ou d'enseigner dans des conditions dégradées.

Le paradoxe de l'allemand, un paradoxe bien français !


Quelques commentaires des derniers signataires sur la pétition en ligne ( clic !) souligne bien ce paradoxe :

« Qui occupera les centaines de postes dans les entreprises allemandes implantées en France laissés vacants faute de candidats germanistes? »

« Dans le recrutement, c'est bien sur des langues comme l'allemand que se fait la différence ! »

« De nombreux postes ne sont pas pourvus faute de ne pas connaitre l'Allemand . Trés important au niveau européen (industrie, chimie recherche diplomatie , maintenant tourisme ) c'est une erreur monumentale de ne pas encourager l'enseignement de l'Allemand »

« Parler l'allemand a toujours été un atout pour ma vie professionnelle. C'est une chance qui devrait etre donnée aux générations d'aujourd'hui. »

« De nombreux postes (entre autres de techniciens) demandent de connaitre l'allemand! une fois de plus nous ne serons pas à la hauteur,quand plus personne ne parlera allemand. »

«  La maîtrise de la langue allemande m'a permis de trouver facilement mon premier emploi, en 1991... »

« Je constate tous les jours par mes études et mes recherches de stage qu'il est essentiel de savoir parler les langues étrangères. L'anglais offre des opportunités, l'allemand aussi ! »

jeudi 17 mars 2011

Le quotidien aubois l'Est-Eclair, nouveau relais pour notre action

Mardi dernier, une journaliste du journal aubois l'Est-Eclair, s'est intéressée à notre mouvement, interviewant l'une des membres de notre collectif.
Aujourd'hui dans la presse, un article d'une demi-page se fait l'écho de notre message.

A lire en ligne : l'allemand peut-il être sauvé ? 

vendredi 11 mars 2011

De la poudre aux yeux ?

Les problèmes en allemand ne touchent pas que l'académie de Reims, la preuve avec ce témoignage d'une enseignante de l'académie de Nantes, qui, une nouvelle fois, souligne les contradictions du système.


Professeur d'allemand dans un lycée du Mans, j’ai la chance d’enseigner la langue et la littérature allemande dans une toute nouvelle section Abibac ouverte en septembre dernier, sur la proposition de notre inspectrice. Il me semble important, pour bien mettre en relief ce qui suit, de souligner que cette création s’est faite sous l’impulsion de l’institution, et non des professeurs, même si nous nous sommes bien entendu fortement impliqués dans le projet dès que l’idée nous a été soumise et nous impliquons encore pour recruter des élèves, nombreux à être intéressés par cette possibilité de passer un double bac français -allemand.
Après la section de Nantes ouverte en 2006, celle du Mans en 2010, des moyens sont mis en oeuvre pour ouvrir, à la rentrée prochaine, une troisième section à Angers.

Quant aux classes européennes, nous savons tous les succès qu’elles rencontrent, il en existe une dans le lycée voisin au nôtre, avec des collègues qui s’engagent et contribuent à un recrutement important.

L'allemand se porte donc bien dans l'académie de Nantes ?

NON !!! Car si on monte des sections "poudre aux yeux", on sape le travail des collègues en collège et on ne donne pas les moyens horaires aux classes bilangues de fonctionner. Sans compter les tentatives de supprimer l'allemand LV2 en quatrième.

Nous entendons régulièrement les collègues se plaindre de ne pas avoir été autorisés à passer dans les classes de CM2 pour promouvoir l’apprentissage de l’allemand, sans parler bien sûr de l’inexistence de l’enseignement de l’allemand en école primaire…
Pour ce qui est des classes bilangues, il n’y a à ma connaissance aucun collège de l’académie qui ait dans sa DGH 6 heures pour dispenser les enseignements de LVA et de LVB, alors que ce sont les horaires préconisés pour un bon fonctionnement de ce concept.

L’enseignement de la LV2 est menacé depuis longtemps déjà par le classique « Anglais LV1 – espagnol LV2 », il ne faudrait pas oublier que d’autres langues – parlées par nos partenaires et voisins européens – sont proposées : l’italien et l’allemand ...

Dans un des collèges dont nous accueillons les élèves ensuite au lycée, l’allemand LV2 a été sauvé « de justesse » pour 2011-2012, uniquement parce que les professeurs principaux avaient déjà demandé aux enfants – et aux parents- quelle LV2 ils souhaitaient apprendre l’an prochain, et qu'il y avait suffisamment d'élèves pour maintenir un groupe ! Mais si ces demandes n’avaient pas été faites aussi tôt, on fermait tout bonnement, sans consulter les principaux intéressés : les élèves !

Tout cela, vous le savez sans doute, ce sont certainement des « anecdotes » que vous avez entendues, mais cela me semble fort peu cohérent avec les affichages politiques européens et surtout franco-allemands !

Quelles visées à moyens termes ?

Je dois avouer que je m'interroge vraiment sur les visées à moyens terme de cette politique:

Veut-on recréer des classes d'élite avec l'allemand en ne rendant accessible l'allemand qu'aux « bons » élèves ? S'enfonce-t-on dans le formatage et l'enseignement a minima ?

OUI au développement des classes européennes, OUI à la création de sections Abibac

MAIS QUI ACCUEILLERONS-NOUS DANS CES SECTIONS SI L’ALLEMAND DISPARAIT EN COLLEGE ?!

La situation dans notre académie n'est pas pire, je pense, que dans les autres, mais je suis personnellement face à des collègues de collège qui se battent au quotidien, qui s’investissent énormément et voudraient nous envoyer des élèves, mais me disent que leurs classes sont menacées.
Quelle cohérence ? Quelle réelle volonté politique ? A quoi sert de donner des moyens à des sections 'spécialisées' (où les élèves s'éclatent, il faut le dire aussi ! Ce sont eux nos meilleurs ambassadeurs !!) s’il n'y a plus d'allemand en collège ?!

mercredi 9 mars 2011

5000 signatures en ligne !

Aujourd'hui, la pétition en ligne vient de dépasser les 5000 signataires : enseignants, chercheurs, parents, étudiants, personnalités investies dans les relations franco-allemandes, élus, s'unissent pour soutenir la langue allemande à l'école.

Rejoignez les en signant à votre tour l'appel lancé par le collectif "sauver l'allemand" le 13 février dernier.

Un petit clic !

dimanche 6 mars 2011

A bas les clichés : le Français, nul en langues !


Nous, les français sommes "nuls en langues", comme on le répète souvent en fanfaronnant avec un certain plaisir et disons le franchement, pour généraliser notre propre incompétence en la matière.


Alors, il y aurait une sorte de prédestination du Français à être « nul en langue », une fatalité qui pèserait sur la France et qui ferait que, de génération en génération, quelque soient les moyens mis en oeuvre, le Français ne pourrait pas apprendre convenablement les langues.




Non, si nous ne faisons pas d' étincelles, il y a des raisons plus rationnelles et sur lesquelles on peut sans aucun doute agir.

Lorsqu'on parle de langues en France, c'est avant tout à l'anglais que l'on pense. C'est d'ailleurs la première langue à laquelle on confronte les élèves, dans un but louable de maîtrise plus rapide de la langue de communication à l'international.

Pourtant, l'anglais est, pour le Français, très éloigné de sa langue d'origine, plus proche des langues latines telles l'espagnol ou l'italien et comporte de nombreuses difficultés, de l'aveu même de natifs anglophones tels Theodore Roosevelt ( orthographe déconnectée de la prononciation, souvent imprévisible, nombreux idiomatismes) bien plus encore que d'autres langues anglo-saxonnes telles l'allemand. Ainsi, la première langue à laquelle le petit Français est mis en contact, le place dans une situation de difficultés, qui souvent provoque des blocages.

Et encore davantage lorsque dans les médias, on compare la situation en France à celle de nos voisins européens, sans prendre en compte certains facteurs essentiels à la lecture des chiffres fournis, comme le faisait encore le secrétaire général de l'UMP Jean-François Copé au début du mois de février dans un article intitulé «  les Français must speak english ».

Comparer la France au Danemark, à la Finlande ou aux Pays-Bas dans l'apprentissage de l'anglais est une aberration à deux niveaux : d'abord, ces pays sont de petits pays, dont la langue n'a jamais eu de rôle prépondérant au niveau international et qui donc ont depuis longtemps la nécessité d'utiliser l'intermédiaire de l'anglais dans leurs relations au monde. Ensuite, les langues maternelles de ces pays sont originaires du même groupe que l'anglais, d'où la plus grande facilité à acquérir les structures et le lexique pour ces pays. Si la langue internationale était l'espagnol, pas sûr que les petits Danois ne dépassent les petits Français dans la grande course à la maîtrise de LA langue indispensable.

A la fin des années 90, une autre voie avait été envisagée pour l'apprentissage des langues chez les plus jeunes, car il est unanimement reconnu qu'une confrontation précoce à d'autres langages favorise leur apprentissage. Il s'agissait du projet Evlangues.

Cette voie ne plaçait pas l'anglais en position de quasi-monopole à l'école primaire mais permettait une découverte de multiples langues. Le but était de préparer à l'apprentissage ultérieur des langues, grâce à un enseignement transdisciplinaire puisque la découverte des langues pouvait se faire dans le cadre de nombreuses disciplines ( musique, histoire, arts, français …). Cette découverte pouvait de plus se faire dès la maternelle sans aucune difficulté, ni pour les enfants, ni pour les maîtres puisque l'éveil aux langues ne nécessitait pas un réel niveau en langues pour les professeurs des écoles.
Grâce à l'éveil aux langues, chaque élève pouvait découvrir et observer des langues telles le vietnamien, le polonais, le coréen, le portugais à côté des langues plus traditionnellement enseignées dans les collèges et les lycées.
Les avantages étaient multiples : l'enfant s'ouvrait à la diversité linguistique et culturelle et pouvait se motiver pour l'apprentissage des langues même si certaines ne lui plaisaient pas. Il pouvait également développer ses capacités de raisonnement et d'observation de sa propre langue.
Arrivé au collège, il commençait alors l'apprentissage plus approfondi d'une puis de deux langues vivantes.
Cette expérimentation a malheureusement été rapidement abandonnée pour mettre en place l'apprentissage de l'anglais dès le primaire dans la très grande majorité des écoles françaises.



De même, l'apprentissage bilangue anglais – allemand, qui participait à la même démarche d'interdisciplinarité et de mise en parallèle de deux langues, semble lui aussi avoir désormais du plomb dans l'aile.
Pourquoi ? Parce que l'esprit de la classe bilangue n'est que très rarement respecté par les établissements et par les enseignants. Il s'agirait dans l'idéal, que les deux professeurs de langue travaillent ensemble, en parallèle avec des approches communes, des outils partagés, des évaluations concertées pour permettre aux élèves de voir la cohérence qui existe dans l'apprentissage des langues. Les manuels scolaires sont d'ailleurs conçus pour pouvoir respecter cet esprit. Dans la réalité, la deuxième langue du binôme devient secondaire par rapport à l'anglais, jusqu'au point où parfois les horaires normalement équitables sont déséquilibrés.
A l'origine la bilangue était une bilangue anglais – allemand et cette association avait une vraie raison d'être puisque les deux langues sont « cousines » et l'apprentissage de l'une peut favoriser celui de l'autre et vice-versa. Par la suite, on a mis en place des bilangues anglais – espagnol alors que le parallèle entre les deux langues n'a que peu d'intérêt linguistique.
Encore un moyen de conforter l'hégémonie de l'anglais et de tuer toute logique dans un concept qui pourtant aurait pu, au même titre que l'éveil aux langues à l'école primaire, favoriser l'apprentissage de l'anglais et de l'allemand au collège.



Alors, si les français sont « nuls en langues », à qui la faute ? Au destin ? Aux enseignants de langue ? Ou à l'institution qui faute de savoir ce qu'est une langue choisit une politique en calquant des modèles d'apprentissage de l'anglais appliqués chez nos voisins, sans réfléchir à la réalité de notre pays, de notre langue ...

samedi 5 mars 2011

Rendez-vous sur Champagne FM

Certains champenois fidèles à leur radio locale, en ont peut-être déjà entendu un extrait.

Lundi, l'intégralité de l'interview réalisée pour la radio Champagne FM au nom du collectif "sauver l'allemand" sera diffusée à 12H30 et rediffusée dans la journée.

Tous sur les ondes !

mercredi 2 mars 2011

La fin de l'allemand à l'école publique accelérera t-il la fuite vers le privé ?

Un deuxième débat aujourd'hui, s'appuyant à nouveau sur les commentaires nombreux de la pétition en ligne. Après l'inquiétude quand au choix de la LV2, les signataires s'inquiètent et s'indignent que la disparition de l'allemand dans le public favorise la fuite des élèves intéressés vers le privé.

Faudra-til désormais payer pour apprendre l'allemand ? Une situation qui ne ferait que renforcer encore l'image élitiste qui colle déjà trop à la peau de la langue allemande.

Voici quelques avis sur la question. N'hésitez pas à donner votre point de vue au bas de ce post.


"Cette suppression est dans la logique des choix du gouvernement: l'étude de l'allemand se fera désormais dans le privé! Et paiera qui pourra!"
  
L'allemand est en train effectivement de disparaître de l'offre du service public de la manière la plus subreptice qui soit. En revanche, on s'active sur le marché privé pour élaborer les outils d'apprentissage d'une langue qui n'est pas uniquement celle de Goethe"

"Il faut arrêter d'asphyxier l'Education Nationale au profit du privé sous toutes ses formes."


"Il est primordial de conserver l'apprentissage de cette langue, sinon de plus en plus d'élèves iront dans le privé, et par conséquent le démantélement du service public..."

"Il faut sauver l'enseignement en France. Si le gouvernement continue sur cette logique il faut fermer toutes les écoles publiques, comme ça il y aura le maximum d'économies."