dimanche 3 avril 2011

Le sacre de Reims et l'abandon de l'allemand, une double lecture de l'agenda 2020

A un mois de la cérémonie d'inauguration des 800 ans de la cathédrale de Reims, l'événement commence à être médiatisé et le journal de 13 heures de France 2 a, cette semaine, consacré son feuilleton hebdomadaire à l'événement sous le titre « Le sacre de Reims » : histoire de la construction de la cathédrale, destruction lors de la guerre, préparatifs du huitcentenaire avec la pose de nouveaux vitraux et répétitions de la maîtrise de la cathédrale de Reims ... Cumulées sur l'ensemble de la semaine, plus de 20 minutes pour célébrer l'édifice.

Un documentaire qui, on peut le présager, ne sera que le premier pas vers une médiatisation plus large de l'événement, un événement qui, au delà de sa dimension champardennaise et nationale, revêt un caractère européen, grâce à sa surprenante place dans l'agenda 2020 de la coopération franco-allemande.

Qu'est-ce que l'agenda 2020 me direz-vous ?

Il s'agit du énième plan de relance de la coopération franco-allemande, signé en février 2010, lors du 12ème conseil des ministres franco-allemands.
Angela Merkel et Nicolas Sarkozy y ont établi une feuille de route pour les 10 prochaines années avec une priorité accordée aux liens étroits entre la France et l'Allemagne comme le prouve cet extrait du compte-rendu de l'an passé :

« Nous voulons que la coopération franco-allemande, dont nous sommes les dépositaires et que nous avons le devoir d’approfondir, se renforce et s’étende. Nous sommes convaincus que l’entente étroite entre nos deux pays doit reposer davantage sur le développement des liens entre les deux sociétés civiles, notamment le développement des échanges entre les jeunes des deux pays. L’éducation, la formation et la recherche sont d’une importance primordiale pour notre avenir et nous sommes résolus à y travailler ensemble. Le renforcement concret des liens entre les sociétés civiles française et allemande sera une priorité de notre coopération bilatérale au cours des années qui viennent. »

C'est à ce titre que les 800 ans de la cathédrale de Reims figurent dans l'agenda :


« Faire des 800 ans de la Cathédrale de Reims en 2011 et de l’inauguration des vitraux créés par un artiste allemand un événement symbolique de la coopération franco-allemande »

Il faut se souvenir qu'au titre de la réconciliation franco-allemande, le général de Gaulle et le chancelier allemand Konrad Adenauer, avait déjà en 1962 effectués une visite commune à Reims, dont la cathédrale avait été sévèrement détruite par les allemands.

Gageons que dans un mois, les secrétaires généraux à la coopération franco-allemande Laurent Wauquiez côté France et Werner Hoyer pour l'Allemagne, feront le déplacement dans la cité rémoise pour siroter une coupe de champagne et déguster quelques biscuits rose aux frais de la princesse sous les flashs des journalistes dépêchés pour l'occasion à médiatiser la bonne santé des liens France-Allemagne.

Pendant ce temps, dans leurs établissements respectifs, les professeurs d'allemand de l'académie et de l'hexagone, continueront dans l'ombre, leur travail de fourmis, pour faire vivre la langue allemande dans leurs classes, malgré la dégradation de leurs situations.

Et pourtant, au même titre que le huitcentenaire de la cathédrale, le soutien à l'enseignement de la langue du partenaire figure dans l'agenda :

- « l’apprentissage de la langue du partenaire doit être encouragé et soutenu ... » 
- « D’ici 2020, nous voulons que, parmi les élèves de l’enseignement secondaire, un Français sur deux ou un Allemand sur deux ait visité au moins une fois l’autre pays ; à cette fin, nous appelons les établissements secondaires, à intensifier leurs efforts »

Pourtant, ces 2 points de l'agenda sont loin d'être la priorité de nos dirigeants. Restrictions budgétaires dans la fonction publique oblige, l'allemand, n'a même jamais été aussi touché; Jusqu'à alors, les suppressions de postes et de groupes étaient justifiées par les sous-effectifs. Désormais, on ne fait plus dans la dentelle et on supprime tous les projets innovants des dernières années qui faisaient vivre l'allemand à l'école : initiation au primaire, classes bilangues, sections européennes …
Comment alors imaginer possible qu'un jeune français sur 2 ait visité l'Allemagne d'ici 2020 ?
Pour sûr, les points de l'agenda concernant l'enseignement, s'ils sont les plus évidents, sont loin d'être la priorité.

On pourra se targuer en 2020 d'avoir eu un beau huitcentenaire en taisant la disparition de l'enseignement de l'allemand à l'école !

pour découvrir le documentaire de France 2 : feuilleton "le sacre de Reims" ( l'intégrale)

1 commentaire:

  1. Je ne sais que dire: faut-il en rire ou en pleurer?! Pffff -soupirs, voilà bien tout ce qui me vient à l'esprit en lisant cela et en ayant en écho la voix de mon chef d'établissement: "l'année prochaine, il nous faudra au moins une 20aine de LV2 -NDRL: j'ai pas dépassé les 12 depuis 7 ans-, sinon ce sera dûr de la maintenir..." Voilà: différence flagrante entre politique et réalité de terrain!

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